Aminata Baldé, 21 ans, se tient avec assurance au milieu pour porter sa voix et sans doute celle de centaines de jeunes filles de Koumbakara, située au Nord de Kolda au Sénégal.  “Nous ne voulons plus que nos jeunes sœurs soient excisées ou mariées de force à un âge où elles devraient être à l’école.  » (…) Nous aimons nos traditions et les valeurs qu’elles véhiculent. Mais il faut avoir le courage de remettre en question certaines pratiques de cette tradition, surtout lorsqu’elles ont des conséquences négatives pour notre bien-être”. Ces phrases, Aminata n’aurait jamais eu le courage de les prononcer devant une foule d’adultes, de parents et d’amis dans un cadre autre que celui des rencontres intervillageoises.

Ces rencontres organisées par Tostan sont des occasions privilégiées de réunir tous les membres  de la communauté pour discuter, partager et prendre des décisions de manière inclusive pour régler les problèmes auxquels la communauté est confrontée. Elles réunissent plusieurs villages dans lesquels des agents de mobilisation sociale, appuyés par Tostan, ont au préalable effectué des sensibilisations sur plusieurs thématiques comme le mariage des enfants, les pratiques de l’hygiène, la santé sexuelle et reproductive, l’excision, la protection de l’environnement, etc.  

La rencontre organisée à Koumbakara ce 18 décembre 2023 s’inscrit dans le cadre du programme conjoint de mobilisation sociale de l’UNFPA-UNICEF pour l’abandon de l’excision dans cinq régions du Sénégal (Matam, Kédougou, Tambacounda, Sédhiou, et Kolda). Elle a mobilisé l’ensemble de la communauté, dont des femmes, des jeunes, des autorités municipales, mais aussi l’infirmier chef de poste venu ce jour-là répondre aux questions des communautés sur l’impact de l’excision sur la santé. 

“Ces rencontres sont très importantes pour nous en tant que jeune parce qu’elle nous offre l’opportunité de faire attendre nos voix et d’échanger avec nos parents. La présence de l’Infirmier Chef de Poste  et les informations qu’il nous donne peut aider nos parents à considérer l’abandon de l’excision”, confie Aminata. 

“Je suis convaincue qu’une jeune fille venue ici aujourd’hui et qui a entendu ce que l’Infirmier Chef de Poste a dit ne  souhaiterait faire exciser sa  fille plus tard. C’est comme cela que nos communautés vont progressivement abandonner cette pratique”, rajoute une autre participante de la même tranche d’âge que Aminata. 

Selon l’adjointe au maire qui a pris part à la rencontre, les sensibilisations menées par les agents de mobilisation sociale portent déjà leurs fruits : « Aujourd’hui, même si on ne parle pas d’abandon total, nous remarquons que les communautés s’informent davantage sur les conséquences de l’excision et prennent conscience de ses effets néfastes. »

Outre l’excision et le mariage des enfants, les discussions ont également tourné autour de l’établissement des actes de naissance, des progrès précoces et surtout de l’éducation des jeunes filles. 

À la suite des échanges et des informations reçues lors de la rencontre intervillageoise de Koumbakara,  les villages de la commune de Dialakoto se sont engagés à faire une déclaration publique d’abandon de l’excision et de mariage d’enfant dans les jours à venir.